Combien vaut l'orge ?

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Combien vaut l'orge ?

C'est de l'année 1544 que date l'origine du dicton : Combien vaut l'orge ? mais il faut remonter un peu plus tôt pour comprendre l'histoire.

Historique

Lagny ayant subi de nombreuses guerres, l'abbaye fut ruinée. Philippe Carpen, abbé de Lagny rassembla tous les titres qui avaient été dispersés et échappés à celle-ci. Un cartulaire fut entrepris par le Cardinal François de Clermont. Ce dernier fit faire également les réparations nécessaires sur l'abbaye, et introduisit une réforme dans celle-ci pour y rétablir la régularité et la paix, conformément aux deux arrêts du Parlement des années 1509 et 1514.

La répression

Après la mort de celui-ci, une discorde eut lieu entre l'abbé Jacques du Broullat et les moines qui avaient fait vœux de docilité et de désintéressement. Les habitants prirent partie à cette querelle pour soutenir les moines contre l'appel au calme lancé par François 1er.

Jacques du Broullat demanda et obtint de la part de François 1er de lancer ces troupes contre les habitants et les moines.

Jacques Ier de Montgomery, seigneur de Lorges, dit le « capitaine de Lorges » se trouvait dans les environs et fut désigné pour ramener le calme dans la ville et soumettre les rebelles. Aidé du Capitaine de Montrevain , il commença sa mission en novembre 1544. Les habitants ont résisté un temps, mais le capitaine multiplia les assauts et sorti vainqueur de cette bataille.

Profitant de son statut de vainqueur, il ordonna que tous les hommes en état de porter des armes soient massacrés et toutes les femmes violées. Tandis que le Capitaine de Montrevain pilla l'abbaye et l'église, pris quarante châsses qui contenaient des reliques et les firent brûler en place publique.

Devant tant de violence et de meurtre, le Capitaine de Montrevain fut arrêté sur ordre du roi et décapité en place de Grève, par contre, le Capitaine de Lorges, soutenu par le roi se tira d'affaires, le roi allant même interdire aux habitants de Lagny de se venger. Quant à l'abbé Jacques du Broullat, ses biens furent saisis et servirent à payer les dommages que l'église de l'Abbaye avaient subi lors de ce soulèvement.

Conséquences

La ville n'avait plus d'hommes, les femmes ayant été violées donnèrent bientôt naissance à des enfants, repeuplant ainsi la ville. Par la suite, on reprocha souvent et très longtemps aux habitants leur origine illégitime, ce qui les faisait rentrer dans des colères monstrueuses.

Celui, pour faire allusion au capitaine de Lorges demandait combien vaut l'orge était immédiatement trainé sans aucun ménagement, par le peuple se sentant insulté, vers la fontaine qui se trouvait sur la place principale, de lui faire faire le tour du bassin plusieurs fois avant de le plonger dans l'eau de celle-ci. Si c'était un femme, on l’asseyait sur le bord de la fontaine en lui penchant le corps du coté de l'eau et on lui versait de l'eau sur le dos et la tête

Cette coutume dura très longtemps malgré une sentence de police en 1759, qui interdisait cette pratique sous peine de trente livres d'amende pour celui-ci qui prononçait cette phrase et la même peine pour les habitants qui usaient de violence.

En 1766 on parle encore d'un cas recensé : la nièce d'un curé des environs qui fut sauvé de la punition grâce au curé de la paroisse qui l'enferma dans la sacristie et lui permis de se sauver par une fenêtre donnant dans la cour de l'abbaye et en 1779, un autre cas qui est un témoignage de M. Morel qui avait eu le malheur de prononcer cette phrase :

« Passant très jeune encore, à Lagny, en octobre 1779, je demandai, par gaieté, combien valait l'orge, sans connaitre la conséquence de cette espièglerie. Je fus aussitôt assailli par plusieurs femmes qui sautèrent à la bride de mon cheval; je fus obligé de me sauver au galop à travers les rues de la ville. Les cris de l'orge, l'orge, l'orge me devançant dans ma course, excitèrent quelques ouvriers à me jeter, de leurs boutiques, des chaises, des balais, enfin tout ce qu'ils trouvèrent sous leurs mains pour m'arrêter, ou pour faire abattre mon cheval.

Un meunier se jeta sur moi et me désarçonna si vivement que je n’eus que le temps d'abandonner mon cheval, et de me sauver dans l'auberge de l'Ours, qui se trouvait près de moi. J'y fus poursuivi de très près par des bateliers, des meuniers et des portefaix qui forcèrent la porte de la chambre où je m'étais réfugié, me désarmèrent de mon couteau de chasse, et me saisirent au collet. L'aubergiste, le sieur Turpin, étant venu à mon secours, je me sauvai par une porte de communication dans une maison voisine [...] J'examinai, à travers le vitrage de la fenêtre ce qui se passait dans la rue, je ne crois pas exagérer en déclarant qu'il y avait plus de quinze cents personnes, tant d’hommes que de femmes, deux cavaliers de maréchaussée était même dans la foule. [...] J'atteste que les habitant qui composaient l'attroupement, et ceux qui les excitaient, se sont comportés avec une fureur et une inhumanité incroyables : les injures et les imprécations les plus affreuses n'étaient point épargnées pendant leur recherche[1] »

Le 27 juin 1783, il fallut renouveler la sentence de police décidé en 1759 en la faisant homologuée par le parlement le 4 juin 1785.

Sur la fontaine étaient gravés des vers en latins, dont la traduction serait :

« Arrête-toi, Naïade, n'abandonne pas un lieu où tu es chérie : qu'as-tu à craindre sous les hospices de l'amitié ? C'est toi qui nous vengea des injures adressées aux habitants ; et si quelque mauvais plaisant se présente, ton onde lui apprend à se taire »

Références